« C’est peut-être que nous ne sommes plus dans l’art aujourd’hui. Tout simplement parce que nous avons manqué le moment où celui-ci s’est transformé en quelque chose de complètement différent, que nous ne savons pas nommer. Mais une chose est certaine : ce que nous faisons aujourd’hui offre des possibilités bien plus vastes. »
Jerzy Ludwiński
(Osieki, 1970)

La Biennale de Paris à Toruń n’est pas seulement un événement artistique : c’est un phénomène qui redéfinit la notion même d’art. Dans la ville de Jerzy Ludwiński, auteur du concept visionnaire d’ « ère post-artistique », se rencontrent des artistes et des penseurs qui, au lieu de créer des œuvres, créent des activités. Sans expositions, sans marché de l’art, sans commissaires d’exposition – mais avec un réel impact sur la réalité. C’est de l’art sans objets, mais plein de contenu – avec un travail qui se fait ici et maintenant, souvent imperceptible au premier coup d’œil, mais réel comme une démonstration, un jardin communautaire, une réunion non conventionnelle ou une action collective pour le climat.

La Biennale de Paris a été initiée en 1959 par André Malraux, écrivain et ministre de la Culture, pour faire contrepoids à l’américanisation de la culture française. Elle a rapidement acquis le statut d’événement artistique le plus avant-gardiste d’Europe. Au fil du temps, son caractère novateur a été repris par d’autres institutions artistiques, et dans les années 1980, un manque de financement a conduit à son interruption. Au début du nouveau millénaire, la Biennale a été réactivée par l’artiste Alexandre Gurita. Redéfinie, la Biennale de Paris s’est transformée en une « institution parallèle » qui ne suit pas le cadre de la galerie, mais celui des artistes. Il s’agit d’une plateforme populaire qui promeut ce que l’on appelle l’art invisuel : un art qui ne se réduit ni à un objet, ni à une œuvre, ni à une exposition. Tout comme Copernic, né à Toruń, a montré que la Terre n’est pas le centre de l’Univers, la Biennale montre qu’une œuvre d’art n’a pas à être le centre de l’art. L’art peut être une stratégie, une relation, une forme d’action – et surtout, un processus communautaire de pensée et d’empathie.

La Biennale de Paris à Toruń marque également un pas important vers une coopération durable entre les artistes de Pologne et de France, dans un contexte où le besoin d’une Europe solidaire et renforcée est plus urgent que jamais.

Coorganisée par le Centre d’art contemporain « Znaki Czasu » et la Faculté des Beaux-Arts de l’Université Nicolas Copernic, l’événement réunit diverses attitudes créatives pour créer un espace de réflexion, d’action et de dialogue – dans un esprit d’empathie, d’écologie et de conscience décoloniale. Le Centre d’art contemporain de Toruń est un lieu idéal pour un tel événement d’expression libre, fondé sur des formes artistiques invisuelles et non conventionnelles. Il ne montre pas tant l’art qu’il ne l’active. Il s’agit d’une rencontre de quatre jours qui nous invite à envisager l’art sous un angle radicalement différent de celui auquel nous sommes habitués – non pas comme un produit, mais comme une pratique visant à changer le monde. La Biennale de Paris à Toruń accueille également un colloque scientifique sur l’avenir des collections d’art, intitulé « Quelle collection d’art pour le futur ? », où des présentations artistiques se croisent avec des interventions de théoriciens.

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